Un Bon moment - Vision travail en cours

INTENTION ARTISTIQUE

"[...] Avec mes coauteurices Aloun Marchal et Marine Relinger, nous réfléchissons à un dispositif permettant de révéler une “danse” immersive, impliquant physiquement les spectateur·ices, notamment par le toucher. Et cette danse sera sonore, autre sens primordial pour les personnes non voyantes, que les spectateur·ices seront invité·es à redécouvrir.

Je suis convaincu que personnes mal et non voyantes ont beaucoup à dire sur le rapport de notre corps sensible au monde et, donc, à dire au public à travers cette rencontre. [...] Les mal et non voyant·es peuvent nous inviter aussi à dépasser certaines peurs, certaines représentations, à écouter et nous écouter, à faire confiance à l’autre aussi, souvent. Ils peuvent nous inviter à nous laisser envelopper par le noir du silence, pour redécouvrir la finesse avec laquelle nos sens nous relient au monde, dans toute sa complexité. Entre danse et performance sonore, nous souhaitons que des propositions tour à tour individuelles et collectives, chorégraphiques et audibles, donnent de nouveaux repères à l’espace, tissent le fil entre des témoignages de vie et des pratiques de corps spécifiques. Les danseur·euses et interprètes mal et non voyant·es ont une conscience aiguë de leurs sens dits secondaires : l’ouïe et le toucher. Les interprètes mal voyant·es pourront devenir, à certains moments, les guides des spectateur·ices, transmettent des techniques d’écoute. Les corps des spectateur·ices, circulant dans le même espace, seront ainsi associés à cette quête d’un mouvement collectif plus sensible. Afin que se déploient les enjeux de chacun — par les corps, par la voix —, nous travaillerons à un dispositif qui déhiérarchise les corps pour pouvoir dessiner ensemble un commun, présent partagé de l’espace théâtral.

Nous cherchons avec cette création à voir où la valorisation des sens dits secondaires que sont l’ouïe et le toucher peuvent nous mener chorégraphiquement parlant, tout en déplaçant notre regard sur le handicap visuel. Sans qu’il soit nécessaire d’arbitrairement obturer la vue - puisqu’une part des spectateur·ices sont voyant·es -, la façons dont nos sens nous relient spécifiquement à l’espace et aux autres, est au fondement des explorations que nous souhaitons approfondir avec les interprètes."

Eric Minh Cuong Castaing, directeur artistique

BIOGRAPHIES

Eric Minh Cuong Castaing, chorégraphe et artiste visuel, a fondé la compagnie Shōnen, dont il est le directeur artistique, en 2007. Eric Minh Cuong Castaing est aujourd’hui artiste associé à Montpellier Danse et, avec sa compagnie, au Centre national de la création Adaptée - CNCA de Morlaix, à Bourges Capitale Européenne de la culture 2028, et en compagnonnage avec la Comédie de Genève et la Collection Lambert à Avignon. Ses recherches chorégraphiques explorent les modes relationnels floutant les binarités réel / fiction, nature / culture, organique / artificiel. Il met en relation les corps et la danse envisagés dans leur pluralité esthétique et leur diversité politique, associant des danseur·euses professionnel·les et/ou amateur·ices, dont certain·es sont en situation de handicap ou d’empêchement. La danse, en relation avec l’image et la technologie (robots de téléprésence, drones…), se formule en relation avec des enjeux sociétaux, dans le cadre de processus “in socius” qui associent au long court des partenaires en dehors du champ de l’art (Institut médico-éducatif, hôpitaux, ONG, laboratoires de recherche, écoles…).

Aloun Marchal chorégraphe improvisateur et danseur, est diplômé du SNDO d’Amsterdam. Lauréat des bourses Danceweb (2008, 2012), SACD (2017), Région Västra Götaland - Su.de (2022) et Comité des arts de Suède (2023), il a co-créé des pièces primées comme Gerro, Minos and Him et Bibi Ha Bibi. Avec SonoR (2020), il fusionne danse et musique en live et en 2023, AVATARED mêle danse contemporaine et fête électronique. En collaboration avec Eric Minh Cuong Castaing et Marine Relinger, il poursuit son voyage dans l’art inclusif commencé au sein de la compagnie de danse inclusive suédoise SPINN. Ils créent ensemble L’Age d’Or (2018), Forme(s) de vie (2021), Parc (2022) et Vision (2026). Fasciné par le processus de création de sens, Aloun s’investit dans une approche où penser ne suffit plus, privilégiant une expérience directe et sensorielle de la réalité venant suspendre pour un instant notre irrépressible besoin de faire sens.

Marine Relinger, née à Marseille, est dramaturge et cinéaste. Elle réfléchit aux dispositifs de regards sur les corps et aux fonctions des écritures scéniques et cinématographiques qui les concernent. Dramaturge, elle a notamment co-créé plusieurs pièces de danse portées par la compagnie Shonen : Phoenix (2018), avec des danseurs connectés à distance depuis la bande de Gaza, écrite et mise en scène avec le chorégraphe Eric Minh Cuong Castaing ; puis une série de pièces sur la question des handicaps et associant au plateau des interprètes aux capacités diverses, alternatives ou normées, avec Eric Minh Cuong Castaing et le chorégraphe Aloun Marchal (performance L'Âge d’or - 2018, Forme(s) de vie - 2021, Parc - 2022, Vision - 2026…) Marine Relinger s’intéresse dans le cadre de ces travaux aux notions de relation, de systèmes de violence et de collaboration, cherchant à déplier pour mieux les comprendre les enjeux de nos co-présences et leurs impacts sur les représentations au sein des processus artistiques.