Carmen.

INTENTIONS
Les mots de François Gremaud

« Carmen.

Mon intention est toute entière contenue dans ce titre.
Bien sûr, on le devine, il sera question de Carmen, le plus fameux et représenté des opéras comiques.
Pourtant, bien que son principal sujet, il ne sera pas le véritable sujet de ce spectacle.

Ce dernier se cache sous le point – ici, final – ce signe de ponctuation qui, nous rappelle le grammairien Jacques Drillon, « lorsqu’il est employé après des phrases brèves acquiert un pouvoir exclamatif. Sur le point d’exclamation il a l’avantage de ne point exprimer ouvertement l’étonnement, l’admiration, l’incrédulité. Il prête ces sentiments au lecteur, condamné à s’émerveiller. Le point, dans de tels cas, n’exprime pas : il provoque. »

Provoquer, c’est ce qu’à sa création ont à la fois fait l’oeuvre et le personnage de Carmen : la première en excitant les passions dans la salle, la seconde en enflammant les coeurs sur la scène ; l’une en bravant les codes en vigueur, l’autre en défiant – en même temps que les hommes et son propre destin – les moeurs de son temps.

Comble de la provocation ? Carmen le chante : « Libre elle est née, et libre elle mourra. »

Si la liberté du personnage provoque le scan-dale, celle d’interprète de Rosemary Standley suscite en moi un émerveillement auquel – pour continuer à paraphraser Jacques Drillon – « elle me condamne ».

Grâce à elle, il sera dans Carmen. – comme dans Phèdre ! et Giselle…, deux premiers volets de cette trilogie qui s’achève ici – question de joie.

Et pour cause ! Selon le philosophe Clément Rosset, le génie de Bizet dans Carmen est d’avoir exprimé mieux que jamais le divorce entre ce que dit un livret et ce qu’en pense la musique : la joie musicale contre les tristesses de la vie.

En conclusion d’un texte intitulé Le secret de Carmen, Rosset écrit : « En fin de compte, c’est la musique qui gagne. Et avec elle, l’amour de la vie, qui revient de loin, après en avoir vu, si je puis dire, de toutes les couleurs. » 

François Gremaud

BIOGRAPHIES

Rosemary Standley mène plusieurs projets parallèles, chantant dans des spectacles musicaux et enregistrant avec des artistes comme The Lightnin 3, Dom La Nena et l'ensemble Helstroffer. Née à Paris en 1979, elle étudie d'abord les arts plastiques avant de se tourner vers le chant lyrique au conservatoire du 20e arrondissement de Paris. Après avoir fait partie de Johnny Cash Revival, elle rejoint Moriarty en 1999, et leur premier album Gee Whiz But This Is a Lonesome Town (2007) se vend à 150 000 exemplaires.
En 2012, elle crée le duo Birds on a Wire avec la violoncelliste brésilienne Dom La Nena, dont le premier album sort en 2014. Le duo poursuit avec un nouvel album, Ramage, en 2020, et une tournée à travers la France. Rosemary participe également à Private Domain, spectacle de Laurence Equilbey, et au projet Les Françoises au Printemps de Bourges en 2010.
Avec Brisa Roché et Ndidi Onukwulu, elle forme The Lightnin 3 et enregistre Morning, Noon & Night en 2012. En 2013, elle chante dans A Queen of Heart, un spectacle mis en scène par Juliette Deschamps. L'année suivante, elle enregistre Love I Obey avec l'ensemble Helstroffer et participe à la sortie de A Queen of Hearts et Zanz in Lanfer, un hommage à Alain Péters.
En 2019, elle joue dans Lewis versus Alice au Festival d'Avignon.
Le 11 septembre 2020, elle sort Schubert in Love, un album en collaboration avec Johan Farjot, auquel participe la soprano Sandrine Piau.

François Gremaud co-fonde 2b company en 2005 avec Michaël Monney. Il y crée son premier spectacle My Way, qui rencontre un grand succès. En 2009, il collabore avec le plasticien Denis Savary pour Simone, two, three, four et présente KKQQ au Festival des Urbaines de Lausanne. Il fonde le collectif GREMAUD/GURTNER/BOVAY et signe plusieurs spectacles entre 2009 et 2019.
En 2011, il crée Reet, en 2013, une première version de Conférence de choses, qui devient un succès en 2015 avec une version de huit heures. En 2017, il met en scène Phèdre ! à l’invitation du Théâtre de Vidy-Lausanne, et le spectacle est joué au Festival d’Avignon en 2019. Suivent Giselle… en 2020 et Carmen. en 2023, dans le cadre d’une trilogie sur des figures féminines des arts vivants.
En 2018, il co-écrit et interprète Partition(s), puis crée Pièce sans acteur(s) en 2020. En 2021, il présente Aller sans savoir où, un spectacle explorant le processus d’écriture. En 2022, il crée Allegretto, seul en scène, pour évoquer l’impact de Beethoven sur sa vie. En parallèle, il met en scène Ma Solange, comment t’écrire mon désastre en 2009 et joue avec le collectif GRAND MAGASIN en 2014.
Depuis 2014, il présente X MINUTES avec le collectif SCHICK/GREMAUD/PAVILLON. Il compose aussi des chansons minimalistes et festives et intervient à la Haute École des Arts de la Scène La Manufacture. Lauréat des Prix Suisses de Théâtre 2019 et du Grand prix de la Fondation Vaudoise pour la Culture en 2022.