du jeudi 04 au vendredi 05 avril 2024

Théâtre

Par la mer Quitte à être noyées

Anaïs Allais Benbouali

La Grange aux Belles

© Virginie Meigne
© Virginie Meigne
© Virginie Meigne

Présentation

Houda, Max et Assia. L’une n’a plus de travail, l’autre vient de perdre sa mère, quand la dernière a fui son pays. Générations, origines, parcours différents, mais chacune pourrait être fille ou mère de l’autre. Elles se retrouvent au même endroit au même moment, à un point de bascule de leur vie. Prêtes à écrire un nouveau chapitre… Dans une maison qui prend l’eau, le temps d’un orage, juste à côté de la mer, elles vont devoir cohabiter ou du moins se supporter. Et peut-être pouvoir, enfin, poser à terre leur lourd bagage, se libérer.

Puisant dans sa propre biographie une matière à modeler et à explorer, Anaïs Allais Benbouali crée des liens entre les deux rives de la Méditerranée, entre hier et aujourd’hui. La mer y joue un personnage à part entière, lien ou frontière entre les terres et les êtres, lieu de départ ou d’arrivée, détentrice de secrets et de promesses. Vagues, ressac, abysses : elle a le pouvoir de ressourcer comme de faire remonter les choses à la surface. La mer appelle les récits, les mémoires, les confessions. Permet, parfois, de rétablir un dialogue demeuré longtemps impossible.    


Note d'intention
« J’ai écrit ce spectacle à côté de l’océan. Avec le bruit des vagues en toile de fond. Il est traversé par la mer, son ressac, son humidité salée. La mer comme lien ou frontière entre les terres et les êtres, lieu de départ ou d’arrivée. L’espoir d’un ailleurs possible ou cimetière. Ça appelle les récits … Le pouvoir de la mer, de l’océan, est profondément cathartique. Il a le pouvoir du ressourcement mais aussi celui de faire remonter les choses à la surface. Face à cette immensité, il est difficile de ne pas se regarder en face. Nos masques sociaux sont vite nettoyés par les embruns.
La structure même du texte est construit par vagues, et chaque vague ramène les personnages sur une rive, révélés par la mer. L’histoire nous est d’ailleurs racontée aussi bien par la mer que la mère. Nous rencontrons ces trois femmes, Houda, Max et Assia du point de vue de la mer.e. Elle nous conte leur vulnérabilité, leurs ébranlements et c’est précisément leur condition d’écorchées qui va les rapprocher, malgré les mondes qui les séparent. L’une vient de perdre sa mère, l’autre de fuir son pays et la troisième son travail. Dans une maison qui prend l’eau, le temps d’un orage, elles vont devoir cohabiter ou du moins se supporter. Persuadées que leurs vies sont minuscules, elles vont cependant accoster, ensemble, une certaine grandeur. Solitaires mais solidaires.
De nombreuses discussions avec les comédiennes ont profondément nourri le texte. Avec les femmes qu’elles sont, les questions qu’elles se posent. J’ai laissé les choses apparaitre. Je n’ai jamais d’intentions au début d’une écriture mais je redouble d’attentions pour ce qui m’entourent, comme si je cherchais des indices. Je suis très attentive à ce qui se présente à moi et semble s’inviter dans mes questionnements et donc mon écriture.
Il se trouve qu’au début de l’écriture de cette pièce j’ai perdu ma mère. Il se trouve que j’ai dispersé ces cendres dans la mer. Il se trouve que je vis entre Nantes et le Finistère, à la mer. Depuis je mène une sorte d’enquête sur mon rapport à la mort. Sur la place que la mort a dans la vie. Ce questionnement aussi fondamental que vertigineux a donc été très naturellement la porte d’entrée de cette écriture. Comment vivons-nous avec celles et ceux qui ne sont plus là ? Quelle place leur laisse-t-on ? Quelle place prennent-ils ? le dialogue que j’essaie d’établir avec ma mère est hors de toute rationalité. Je ne parle pas de séance de spiritisme ou de pensées religieuses, mais d’une relation inventée sur mesure, pour et avec la personne absente… Le fait de me sentir « agie » par elle peut me donner la sensation d’une certaine puissance. C’est comme un jeu sérieux. Une relation secrète et invisible, un coquillage au fond de la poche, que personne ne voit mais que je peux saisir à tout moment. Qu’il y ait « quelque chose » après la mort ou pas n’est pas du tout une question qui m’intéresse. Ce qui m’intéresse c’est ce que l’on décide de faire avec la mort. Nos défunts n’existent encore qu’à condition d’inventer, d’imaginer une autre façon de vivre avec eux. Il peut y avoir de la joie là-dedans, de la puissance aussi.
J’aimerais que les spectateur·ice·s sortent du spectacle avec l’odeur des embruns. Un coquillage au fond de leur poche. L’impression que c’est pas que ça commence ou ça finit jamais, mais que ça commence et ça finit tout le temps. »
Anaïs Allais Benbouali


Biographie
Elle est autrice, metteure en scène, comédienne et directrice artistique de la compagnie la Grange aux Belles. Formée au Conservatoire de Nantes et à l’IAD - Institut de Arts et Diffusion de Belgique, elle complète sa formation par des stages, notamment avec Wajdi Mouawad, mais également par des résidences de recherche d’écriture à l’étranger (Québec, Cameroun, Algérie…).
Anaïs Allais Benbouali a été artiste associée au Grand T de Nantes pendant 5 ans. Elle est actuellement artiste associée à la Comédie de Caen, CDN de Normandie dirigé par Marcial Di Fonzo Bo et autrice invitée au Théâtre de la Colline à Paris. Elle signe Lubna Cadiot (x7) en 2012, Le Silence des Chauves-Souris en 2015 et Au Milieu de l’hiver j’ai découvert en moi un invincible été en 2018. Ces trois textes sont publiés chez Actes-Sud Papiers. Le Silence des Chauves-souris a été traduit en espagnol et en anglais et a été joué à Madrid et à Baltimore. En 2016 elle a écrit et interprété W. répondant à une commande de la compagnie de Wajdi Mouawad.
Elle est dramaturge pour d’autres metteur.e.s en scène et dispense des ateliers d’écriture et de mise en voix pour différents publics : masterclass au conservatoire de Caen, classe culturelle numérique à destination de collégiens en partenariat avec Stéréolux, workshop pour universitaires via Etrange Miroir, stage pour amateurs… Elle est l’initiatrice avec Catherine Blondeau du projet Autrices Autruches qui rassemblent 6 auteur.ices sur une commande du Grand T.
Elle a coréalisé avec Isabelle Mandin le documentaire A regarder les poissons co-produit par l’Onda et La Comédie de Caen autour de la création Anaïs Nin au miroir d’Agnès Desarthe mis en scène par Elise Vigier créé au Festival d’Avignon 2021.
En 2024, elle créera un spectacle jeune public Mur Murmure (titre provisoire) en partenariat avec SOS MEDITERRANEE et sur commande du CDN de Sartrouville dans le cadre du festival Odyssées. Elle a été finaliste du Prix Sony Labou Tansi et du Prix Paris Jeunes Talents et lauréate de la Bourse Déclic de la Fondation de France.

Voir, écouter et lire

06/06/2023

Culture Tops

En les confiant à trois personnages de femmes très différentes, incarnées chacune par des comédiennes admirables, la pièce parvient à relier avec subtilité les questions de l’exil, de la perte, de l’hospitalité et de la transmission

Séances et tarifs

Autour du spectacle

Rencontre avec l'équipe artistique à l'issue de la représentation du 4 avril

Générique

Texte et mise en scène : Anaïs Allais Benbouali • Avec : Gaëlle Clérivet, Asmaa Samlali, Louise Belmas et la participation de Majida Ghomari • Collaboration artistique : Guillaume Lavenant • Dramaturgie : Charlotte Farcet • Scénographie : Lise Abbadie • Création sonore : Benjamin Thomas • Musique originale : Julie Roué • Création lumières : Julien Jaunet • Regard chorégraphique : Sofian Jouini • Costumes : Tiphaine Pottier • Création vidéo : Marie Giraudet • Vidéo mer : Lise Abbadie • Construction : Florentin Guesdon • Regards complices : Elise Vigier et Cécile Favereau


Production et administration de la compagnie : Marine Charles et Cécile Favereau • Montage tournée : Emmanuelle Ossena – EPOC productions • Production déléguée : La Grange aux Belles • Co-production : Le Grand T Nantes, La Comédie de Caen-CDN de Normandie, Le Théâtre national de la Colline Paris • Avec le soutien de la Ville de Nantes, du Département Loire Atlantique, de la Région des Pays de la Loire, de la DRAC Pays de la Loire et de la SPEDIDAM

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